Le Couronnement de la Vierge (1453), détrempe sur bois, 183 × 220 cm, commandée par les chartreux de Villeneuve-lès-Avignon, conservée au Musée Pierre-de-Luxembourg, Villeneuve-lès-Avignon. Dans le prix-fait, tout y est soigneusement indiqué et décrit, tant pour la composition, la Vierge devant être couronnée par la Trinité, que pour les personnages, il ne doit pas y avoir de différence entre le Père et le Fils.

La tempera de Quarton : elle date de 1453, autrement dit de la prise de Constantinople par les Turcs qui mit fin définitivement à 11 siècles d'empire romain en Orient.

La violence sensible de la toile montre à l'évidence que les Chartreux d'Avignon l'avaient commandé pour évoquer une nouvelle croisade (on y pensa régulièrement jusqu'au milieu du 17° siècle).
L'égalité parfaite entre le Père et le Fils, c'est l'affirmation hautaine de la formule "filioque", que les trinitaires d'Occident avaient opposée aux johannistes d'Orient (les orthodoxes). Là aussi, c'est un signe de souhait de croisade parti du centre de la France.

La même année, il y eut un long concile à Ferrare, puis Florence, qui proclama (trop tardivement !) l'unité des deux empires romains (d'Orient et d'Occident).
Dans ce concile, se trouvaient de grands savants grecs qui apportèrent aux occidentaux Platon et les néoplatoniciens, plus les textes magiques de l'Antiquité. Bessarion finit sa vie à Venise (Carpaccio l'a peint dans le cycle de Saint-Georges, sous l'aspect de St-Jérome).

C'est pour publier, entre autres, ce nouveau courant de pensée, qu'Alde Manucci fonda son imprimerie.

Lire également le texte de Daniel le Blévec et Alain Girard, "Le couronnement de la Vierge d'Enguerrand Quarton. Nouvelle approche" publié dans les comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 135ᵉ année, N. 1, 1991. pp. 103-126.